Partager sur: facebook whatsapp twitter

L'écopole

suite de la page 1

Notre objectif, c'est de leur faire voir autre chose. On peut par exemple partir à l'extérieur de la ville avec vingt jeunes, on se lave, on porte des habits propres, on mange, on fait des activités, c'est-à-dire ce qu'on avait décidé la veille en regroupant les propositions des enfants.

En fait, les enlever de la rue, est-ce que c'est une solution, est-ce que ce n'est pas une solution ? Ce qu'on essaie de faire, c'est de positiver la situation. Il faut qu'ils s'adonnent, même dans la rue, aux choses qui peuvent les faire avancer. Il y a un élan de solidarité. Il y a une certaine fraternité. Ils sont très intelligents. Parfois, tu as l'impression d'être devant des adultes qui te parlent de leur expérience comme des vieux.

C.D. : On peut dire que c'est un succès ou vous avez une part d'échec que vous pouvez estimer ? Tous les enfants qui viennent ici ressortent-ils avec un minimum de formation et surtout l'envie de  s'en sortir  seuls ?

A.T. : Nous, c'est pas le succès qui nous intéresse. Les enfants viennent proposer des activités, on change ce qu'on avait prévu pour satisfaire la masse.

C.D. : Vous vous adaptez aux besoins.

A.T. : On s'adapte toujours aux besoins qui se font ressentir.

C.D. : Depuis combien de temps existez-vous ?

A.T. : On a été créé le 13 avril 1996, date de l'inauguration de l'écomusée mais en fait, il y avait une écopole au niveau du centre culturel Blaise Senghor pour initier les jeunes à l'informatique.

C.D. : Vous avez ici, dans une autre partie de vos locaux, une grande pièce réservée à une exposition intitulée "Ingénieuse Afrique". De quoi s'agit-il ?

A.T. : C'est une exposition internationale itinérante qui a fait le Bénin, la Côte d'Ivoire, le Mali, le Sénégal et le Canada. On y voit ce qu'est le phénomène de récupération, le recyclage en Europe à l'époque des "efforts de guerre", et la pratique en Afrique sous toutes ses formes.

Le phénomène de récupération a été favorisé par le fait que certains quittent la campagne pour la ville et sont venus sans formation en espérant trouver du travail.

Ils ont été confrontés à des difficultés qui les ont amenés à réfléchir. Ramasser dans les poubelles et aller vendre, c'était un avantage qui s'offrait à eux. Ils ont eu à s'organiser en groupes au niveau des décharges et amener la matière première aux artisans.

Qu'est-ce qui est ramassé dans les poubelles :

  • le métal

  • le verre

  • le plastique

  • le tissu

  • le caoutchouc

  • le papier.

 C.D. : Ces mallettes faites de boîtes de conserve et de sodas ont un succès international. Comment expliquez-vous ça ?

A.T. : La malle, ça offre un clin d'œil sur les habitudes alimentaires.

Puis, il y a les garde-manger faits en fil de fer pour ceux qui n'ont pas l'électricité, ou de frigo. Il y a des lampions, des chaussures à base de pneus de voiture, un sac en plastique transformé en corde, des napperons faits d'emballage de bonbons faits au Swaziland par les réfugiés mozambicains, des objets en papier mâché, etc.

C.D. : Ici, nous avons des jouets : des avions et des voitures faits de matériel de récupération.

A.T. : Il y a des personnes qui se sont amusées à faire le Concorde. Ce sont des gens de trois pays différents qui n'ont pas les mêmes réalités culturelles et c'est ainsi qu'en Côte d'ivoire, le Concorde a l'air d'un Boing, au Zimbabwe, il a l'air d'un avion de guerre et au Sénégal, c'est beaucoup plus raffiné ! Il y a également des jouets qui nous rappellent le phénomène qui se passe chaque année en décembre : le rallye Paris-Dakar.

Les deux tiers de l'économie du Sénégal sont basés sur le secteur informel. C'est un secteur qui est à favoriser parce que ça sert de catalyseur, de régulateur, par rapport aux foyers de tension qui peuvent exister. Chacun peut faire ce qu'il a à faire mais dans un élan de solidarité. Le fondeur d'aluminium, pour ses outils, doit aller voir le forgeron ; le forgeron, pour travailler, il faut qu'il aille voir le ferrailleur, etc.

Il s'agit aussi de créer des systèmes de cotisations, des tontines. On les aide à s'en sortir avec des solutions qu'on élabore ensemble.

C.D. : Qu'est-ce qui manque le plus dans ce quartier ?

 

Vers la page 3