«Mbaraan», frivolité du couple de hasardLes femmes «mbaraan kat» (frivoles) n’ont cure du SIDA. Elles ne se préoccupent pas de la publicité tapageuse sur sa prévention ni contre les Maladies sexuellement transmissibles (MST). Préserver la virginité jusqu’au jour du mariage n’est plus leur souci, parce qu’elles entretiennent des relations intimes avec tout postulant qui peut aider à régler quelques problèmes d’ordre financier, matériel ou même «passager». Idem pour les hommes qui passent leur temps à courir tranquillement après les jupons, en faisant montre d’une grande générosité, au point de se compromettre et de sacrifier les dépenses familiales sur l’autel de la recherche du plaisir. Ces hommes ne sont pas que des victimes, bien au contraire. Toutefois, le plus souvent, ce sont les femmes, de plus en plus jeunes aujourd’hui, qui prennent les initiatives, faisant valoir leurs mensurations et d’autres arguments corporels. Au même titre que les garçons dont on dit qu’ils passent tout leur temps à papillonner les jeunes filles (il se disait, il n’y a guère, que le «mbaraan» est le fait exclusif des dames) collectionnent les amants qu’elles appellent leurs «mbaraan» . Ils sont des hommes pour qui elles n’éprouvent aucun attrait sentimental, sinon celui du gain. N’ignorant pas souvent les intentions affichées ou cachées de ces jeunes filles, des hommes participent volontiers au jeu, généralement à l’insu de leurs épouses et au détriment de leurs familles, pourvu seulement qu’ils arrivent à satisfaire leurs désirs de posséder de la «chair tendre». «Je suis une femme divorcée. J’ai déjà comptabilisé plusieurs années de mariage et je suis mère de deux enfants. Avec tout cela, j’estime avoir dépassé l’âge où il faut développer des sentiments d’amour-passion. Actuellement, si je sors avec un homme, il doit être en mesure de m’entretenir financièrement et de m’aider dans la scolarisation de mes enfants», explique Aïssatou, 39 ans, opératrice de saisie dans une entreprise de la place. Selon elle : «cela n’est pas de la prostitution, mais simplement un réalisme qui découle d’une certaine maturité dans les relations entre garçons et filles». Pour satisfaire ces préoccupations, Aïssatou déclare qu’elle ne peut se suffire d’un seul amant. Qui plus est :«la plupart des coureurs de jupons sont des salariés, responsables de famille. Ils n’ont pas souvent assez de moyens pour prendre en charge financièrement et leur famille et leurs maîtresses». Dans les boîtes de nuit, les cafés, cinémas et même dans la rue, ce sont des jeunes adolescentes que l’on voit en compagnie d’hommes mûrs, dont certains ont l’âge de leur père. Le jour, elles font le tour des bureaux des administrations des entreprises pour empocher quelques billets leur permettant de s’acheter des habits ou plus généralement de menues choses. Interpellée, Absa, 26 ans, explique que : «la plupart des jeunes filles, adeptes du mbaraane ont déjà leurs petits amis, qu’elles aiment jalousement. Mais, comme les temps sont durs, leurs petits copains n’ont pas souvent les moyens de régler leurs problèmes. Vous savez, avec la mode qui évolue régulièrement, nous sommes obligées de renouveler nos gardes-robes. Tout le monde sait que ce ne sont pas les garçons d’aujourd’hui qui donnent l’argent de poche à leurs copines». Son amie, Bineta de poursuivre : « au contraire, maintenant ce se sont les jeunes-filles qui dépensent pour leurs copains afin de les retenir. Pour cela, il faut trouver de l’argent, même si on ne travaille pas, car il existe des femmes, des driankés sans pudeur, qui sont prêtes à dépenser des fortunes pour nous prendre nos petits amis. Que voulez-vous que nous fassions alors ?» Anta, une étudiante en première année de Sciences économiques, est plus tranchée. Selon elle : « aucun garçon n’ose jurer que sa petite amie ne fait pas de mbaraane. Car, ils nous aiment belles et élégantes, mais rechignent à nous demander de l’argent. Pourtant, ils savent pertinemment que nous ne ramassons pas ce que nous portons. De même, quand nous leur faisons des cadeaux, ils ne nous les retournent pas, ni ne nous demandent comment nous avons pu nous les procurer». Ainsi, pour gagner de l’argent facilement et se faire belles, ces jeunes filles multiplient leurs partenaires en faisant fi des risques encourus sur les plans de la santé et de la morale. Abdou Sall, appelons-le ainsi, un comptable, la cinquantaine consommée, est féru de disquettes (Ndlr : les adolescentes mondaines). Selon lui : «les disquettes sont fascinantes. Elles vous amusent, vous aident à faire le vide». A l’en croire : «à longtemps fricoter avec elles, on se fait une nouvelle jeunesse, on comprend mieux leur génération. Il suffit seulement de savoir se comporter avec elles». Interrogé sur les sommes importantes d’argent qu’elles exigent aux hommes, Abdou Sall trouve que :«cela n’est rien comparé à tout ce qu’elles vous rapportent. Surtout que leurs exigences ne sont que des caprices de jeunes filles». Pour cet autre quinquagénaire : «ce qui est intéressant chez les jeunes filles, c’est qu’elles nous permettent de changer de discours. Elles nous stimulent et nous incitent à être plus regardant sur notre mise, entre autres». Et de préciser que : « nous prenons toutes nos dispositions pour éviter les travers». Bassirou SOW
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